La loi 2021-1104 du 22 août 2021 marque une étape importante dans la libéralisation du marché des pièces détachées automobiles en France. Bien que cette mesure vise à réduire les prix des pièces, son impact reste limité.
Une augmentation significative des prix des pièces
Quelles sont les raisons de cette évolution ? Selon le droit français, les pièces automobiles visibles (pare-chocs, pare-brise, feux, rétroviseurs, capots, ailes, etc.) sont protégées par le droit des modèles et dessins et par le droit d’auteur. Par conséquent, les constructeurs ont le monopole de la distribution de ces pièces aux réparateurs.
Cependant, les prix de ces pièces ont considérablement augmenté depuis la fin des années 1990. Entre 2019 et 2020, ils ont augmenté en moyenne de 8%, ce qui a entraîné une augmentation globale des coûts de réparation de près de 7%. Cette hausse des prix est largement due à la complexité technique des différentes pièces qui intègrent désormais des moteurs dans les rétroviseurs électriques, des capteurs dans les pare-brise, etc.
L’introduction de la “clause de réparation”
En juillet 2011, l’Autorité de la concurrence a ouvert une enquête qui a révélé que les constructeurs détenaient un monopole légal sur plus de 70% des ventes de pièces détachées, tandis que les équipementiers détenaient un duopole sur les 30% restants. Malgré plusieurs projets de loi visant à modifier ce système, les constructeurs ont systématiquement réussi à les contrer, arguant de la protection de leurs investissements en recherche et développement.
En 2019, le projet de loi a été réexaminé dans le contexte de la colère des gilets jaunes liée au pouvoir d’achat, mais a été rejeté deux fois par le Conseil Constitutionnel. C’est finalement la loi Climat qui introduit une “clause de réparation” permettant une libéralisation limitée du marché, à l’image des pratiques déjà en place dans une douzaine de pays de l’Union européenne. Il n’est pas surprenant que les pays les plus libéraux en la matière soient ceux qui n’ont pas une industrie automobile très développée, contrairement à l’Allemagne où le marché est déjà plus ouvert.
Les pièces de vitrage en première ligne
En 2012, l’Autorité de la concurrence avait recommandé une levée progressive et maîtrisée des restrictions sur les pièces de rechange destinées à la réparation. C’est précisément ce qui se produira à partir de 2023, mais de manière très limitée.
À partir du 1er janvier de cette année, les équipementiers, qu’ils soient de première monte (ceux qui ont participé à l’assemblage du véhicule neuf) ou indépendants, pourront commercialiser les pièces de vitrage. Cependant, cette libéralisation n’aura qu’un faible impact car les coûts de réparation des vitrages ne représentent qu’une part mineure des dépenses.
Une protection du design réduite à dix ans
Quant aux autres pièces détachées visibles (pièces d’optique, rétroviseurs, etc.), les équipementiers de première monte seront autorisés à les commercialiser, tout comme les constructeurs. Il est encore trop tôt pour dire dans quelle mesure les équipementiers seront prêts à entrer en concurrence directe avec les constructeurs qui les approvisionnent. La Fédération française de l’assurance (FFA) souligne que la période de dix ans pour produire et commercialiser ces pièces, à partir de leur enregistrement, est encore trop longue pour avoir un impact significatif à court terme sur le coût des pièces détachées. L’industrie de l’assurance aurait préféré un délai de cinq ans.
Bien que cette loi constitue une avancée vers une plus grande libéralisation du marché des pièces détachées automobiles, le législateur a clairement cherché à ménager les constructeurs.