Voyager en voiture électrique sur l’autoroute A7 : Retour d’expérience

Reportage – Le chassé-croisé en voiture électrique : une journée en enfer sur l’autoroute A7 ?

Reportage - Le chassé-croisé en voiture électrique : une journée en enfer sur l'autoroute A7 ?

La congestion aux bornes de recharge les week-ends d’été est un sujet qui suscite beaucoup de sensationnalisme. Afin de faire le point sur cette réalité, nous sommes allés à votre rencontre sur la route du soleil.

Les vacances d’été sont tant attendues par tous, mais cette période est également propice à une réflexion sur les voyages en voiture électrique, sur les routes encombrées des vacances. Un récent article de France Info a même suscité beaucoup de réactions sur les réseaux sociaux. Ces plateformes voient alors affluer de nombreux commentaires critiquant la prétendue faible polyvalence des voitures électriques dans ces conditions. En été, les véhicules électriques sont donc sous le feu des projecteurs : auront-ils une autonomie suffisante avec la climatisation en marche dans les embouteillages ? Pire encore, les voyageurs atteindront-ils la mer avant de tomber en panne sèche ?

Au milieu de toutes ces discussions stériles, une thématique revient constamment : l’affluence aux bornes de recharge et les éventuels temps d’attente avant de pouvoir faire le plein. En théorie, la réponse semble évidente pour les néophytes : le nombre de voitures électriques augmente plus rapidement que celui des bornes de recharge rapide, et les recharges prennent plus de temps que les ravitaillements en carburant des véhicules thermiques.

Malgré le fait que nous ayons écrit le contraire toute l’année, nous avons décidé cette fois-ci de démêler le vrai du faux sur le terrain, sur l’autoroute A7, l’une des autoroutes les plus fréquentées de France, lors d’une des pires journées de l’année selon Bison Futé. Nous avons ainsi observé la situation aux stations de recharge entre Lyon et Orange pendant douze heures, étudié les habitudes des conducteurs en matière de recharge et recueilli vos témoignages. Et nous avons été surpris à plusieurs reprises.

6h00 : Les lève-tôt s’emparent des bornes

Nous sommes familiers de l’autoroute A7, surtout à cette période de l’année où les premiers embouteillages se forment dès l’aube. Cette année encore, rien ne change : alors que le soleil n’est pas encore complètement levé, de nombreux conducteurs prévoyants sont déjà sur les routes et les premiers bouchons apparaissent dès Chasse-sur-Rhône, au sud de Lyon. Parmi le flot de voitures, les véhicules électriques sont de plus en plus nombreux. En plus des voitures provenant des pays nordiques, il y a désormais davantage de Belges et de Français, de plus en plus nombreux à franchir le pas. C’est le cas de Christophe et de sa famille, originaires de Charleroi, que nous avons rencontrés à l’aire de Saint-Rambert-d’Albon. Alors qu’il s’apprêtait à reprendre la route au volant de sa Renault Megane e-Tech, il nous a déclaré : “Traverser la France en voiture électrique est devenu tellement facile. Mais nous préférons partir tôt pour éviter la foule sur la route.”

Ici, l’objectif est d’éviter autant que possible les embouteillages à venir et les fortes chaleurs, plutôt que de s’assurer de trouver une borne disponible. Pourtant, cette station avec six bornes est complète dès les premières lueurs du jour, avec une variété de voitures électriques. Cependant, malgré le flux incessant de véhicules qui crée même un embouteillage à l’entrée de l’aire, aucune voiture électrique n’a eu à attendre son tour. Mais il est évident que la rotation manque cruellement de fluidité. Vincent, propriétaire d’une Kia EV6 et passionné de la plateforme e-GMP, s’en inquiète : “Si tout le monde conduisait une EV6, ce serait beaucoup plus disponible !”, s’exclame-t-il.

Ce qui compte ici, ce n’est pas tant le temps de recharge que l’observation de bonnes pratiques. Si un autre propriétaire de Kia EV6 décide de rester près de sa voiture avant de la débrancher pour la déplacer plus loin afin de prendre son petit-déjeuner, d’autres choisissent de rester sur place. Par exemple, une famille à bord d’une Porsche Taycan Cross Turismo continue de savourer des pains au chocolat sur le capot du break, même si la courbe de recharge est catastrophique en fin de charge. Ou encore cette Volkswagen ID.4, qui en plus d’avoir été branchée trop tôt, reste garée avec une batterie à 100%. Cela ne pose pas vraiment de problème à ce moment-là en raison de la faible affluence, mais il est difficile de croire que cela a un lien de cause à effet.

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9h00 : Ruée vers les pompes à essence

Environ 1h30 et 95 km plus tard, nous sommes sur la célèbre aire de Montélimar, la plus grande d’Europe et la plus fréquentée, avec des pics atteignant près de 70 000 personnes par jour pendant cette période. Malgré l’affluence soutenue et les 1 300 places de parking, les sept bornes Ionity ont de quoi faire sourire. C’est probablement ce qui a poussé Vinci à engager des agents pour accompagner les conducteurs de véhicules électriques et gérer les flux. L’un des agents nous explique : “Nous veillons à laisser des places libres pour les voitures électriques et nous demandons aux gens de ne pas dépasser 80% de charge. Une fois la charge terminée, nous orientons les personnes vers nos collègues et d’autres places de parking.”

Un conducteur de voiture électrique confirme : “Ce matin, j’ai chargé au Supercharger Tesla et il ne restait que quatre bornes libres. Ici, il y a moins de monde.” Cela confirme notre impression : le flux tant redouté n’a pas eu lieu au moment de notre passage, avec une fréquentation à peine inférieure à celle de notre premier arrêt. En revanche, la station-service située juste en face ne désemplit pas. Bien sûr, la rotation y est logiquement plus rapide, mais les esprits commencent à s’échauffer, probablement en raison du manque de caféine, si l’on en juge par les coups de klaxon incessants.

Une constante se dégage : les taux de charge des véhicules avant la recharge sont bien trop élevés. Malgré les agents et la signalisation qui demandent aux conducteurs de ne pas dépasser 80% de charge afin de ne pas perdre de temps et de monopoliser une borne, ce type de recharge supplémentaire ne se fait finalement pas plus rapidement et prend plus de temps qu’il ne le devrait. L’avantage de faire le plein pendant les temps morts devient un inconvénient pour tous, en particulier sur ces petites stations mal dimensionnées.

12h00 : Calme plat à Mornas

C’est le sujet de notre discussion avec un conducteur néerlandais d’une Volkswagen ID.4 à la toute nouvelle station Ionity de Mornas. Celui-là même qui, 130 km plus au nord, à l’aire de Saint-Rambert-d’Albon, a choisi d’occuper une borne jusqu’à ce qu’elle soit pleine avant de venir ici avec 70% de batterie. Il nous explique : “Ça ne me prendra que quelques minutes, mais j’en profite pour récupérer de l’autonomie.” En effet, dix minutes plus tard, il repart avec une batterie à 80%, après avoir pris le temps de choisir et d’acheter un sandwich.

Pourtant, cette stratégie est étonnante : s’il n’a pas confirmé la consommation de son SUV, nos estimations indiquent une moyenne de 17,5 kWh/100 km. C’est donc une consommation comparable à une conduite en milieu périurbain, en raison des nombreux ralentissements. Cela montre clairement que, malgré une chaleur de 30°C qui met les systèmes de climatisation à l’épreuve, l’autonomie n’est pas vraiment un problème sur la route des vacances. En bref, les voitures font une pause, même si la recharge de leur batterie n’est pas nécessaire.

Les conducteurs de véhicules électriques seraient donc bien avisés de profiter de cette grande aire, où seulement cinq voitures se partagent les 16 bornes de recharge haute puissance disponibles. Soudain, le silence règne. En effet, quelques minutes avant midi, la station est totalement libre pendant une dizaine de minutes ! Si nous avons été surpris, les experts produits de Volkswagen France présents sur place pour accompagner et offrir des recharges aux clients de la marque ne le sont plus vraiment : “Ce n’est pas la première fois que la station est vide. Entre midi et deux, les gens vont arriver, mais pour l’instant, nous sommes dans une période creuse. La plupart anticipent et rechargent la nuit”, explique l’un d’eux avec précision.

Entre midi et deux heures, jamais plus de 50% de la station ne sera occupée par des voitures électriques. Cependant, comme toujours, il s’agit de recharges supplémentaires où la puissance de recharge ne conditionne pas le temps d’arrêt, mais le temps du repas.

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15h00 : Les Tesla s’invitent chez Ionity

On pourrait penser que cette faible affluence sur une aire stratégique est due au fait que cette station n’est pas référencée sur les planificateurs d’itinéraires embarqués des voitures. C’est ce qu’a analysé Didier Pulicani, responsable du site Mac4Ever et habitué de ce trajet. Pourtant, au vu des taux de charge au début du ravitaillement, il est clair que ces outils ne sont pas, ou peu, utilisés par les automobilistes.

Jean, au volant d’une Tesla Model Y Grande Autonomie, en est la preuve : “Je n’écoute plus ce que la voiture me propose. Honnêtement, ça m’embête de devoir quitter l’autoroute pour aller aux Superchargers. Et puis franchement, le réseau Tesla n’est pas toujours à la hauteur. Il y a beaucoup trop de monde et de nombreuses bornes sont en panne”, nous indique-t-il, tout en nous montrant sur son téléphone des témoignages d’autres propriétaires de Tesla. D’un geste de son badge, la recharge commence alors que nous lui faisons remarquer qu’il dispose encore de 60% de batterie. “L’autoroute est complètement saturée, nous voulions nous détendre un peu. L’avantage ici (chez Ionity, ndlr) est qu’il n’y a pas d’attente. C’est plus cher mais plus pratique. Et regardez, il y a encore des bornes disponibles. Les Superchargers sont plus occupés, et ceux qui se trouvent en dehors de l’autoroute sont malheureusement plus souvent squattés par des voitures thermiques.”

Et on ne peut pas lui donner tort. À l’exception d’une seule famille en Renault Megane thermique qui a monopolisé une borne pour pique-niquer à l’ombre, la station n’est pas prise d’assaut. Pourtant, l’affluence est énorme sur cette aire de Mornas-Les Adrets, située juste après la jonction entre les autoroutes A7 et A9 (dans le sens sud-nord) : après avoir attendu cinq minutes pour entrer sur l’aire, les conducteurs découvrent un parking où les places marquées au sol ne suffisent plus. Cela incite donc les conducteurs de voitures électriques à se brancher tout en profitant d’une place de parking.

En revanche, cela ne semble pas être un luxe pour un conducteur belge d’une BMW i3 Rex, qui fait le plein de sa citadine avec seulement 6% de batterie restante. Son objectif est d’utiliser le moins possible son prolongateur d’autonomie thermique, ce qu’il fait depuis des années, comme il le raconte avec enthousiasme. Cependant, le sourire n’est pas au rendez-vous pour une propriétaire de Kia EV6, qui a dû changer de place pour pouvoir lancer la recharge : “Ionity, ce n’est pas ça. Ça ne marche presque jamais. L’autre jour, j’ai dû attendre 30 minutes près d’Avignon pour finalement ne pas pouvoir charger”. Apparemment, la fiabilité du réseau fait toujours débat, même si nous n’avons rencontré aucune borne en panne ce jour-là.

18h00 : Le bilan est sans appel

Sur le chemin du retour, un crochet rapide par l’aire de Montélimar Est ne fait que confirmer nos premières observations. La tension est réelle sur cette petite station, mais il n’y a pas d’attente malgré l’aire complètement saturée. Sur la route, les embouteillages s’intensifient et il faut se rapprocher de Valence pour voir la circulation s’améliorer. La fin de la journée approche, les voitures sont plus dispersées et la vitesse de circulation augmente. Les véhicules électriques, probablement suffisamment chargés, sautent les étapes pour filer vers Lyon. Ainsi, la nouvelle station Electra à l’aire de Latitude 45, au nord de Valence, est vide : parmi les 14 bornes (pour un total de 28 prises CCS), seule une Kia e-Niro fait le plein ! C’est l’occasion de découvrir l’une des meilleures stations de recharge sur autoroute : les bornes Alpitronic (également utilisées par Fastned) sont une référence en termes de fiabilité, les options de paiement sont multiples, le prix est attractif (0,59 €/kWh sur les bornes 300 kW) et des auvents et des bancs offrent un confort d’utilisation supplémentaire.

Voilà la fin de notre périple sur le terrain, au plus près des voyageurs sur l’autoroute la plus fréquentée de France lors de ce célèbre chassé-croisé. Le bilan est sans appel : la prétendue bataille pour l’accès aux bornes de recharge n’a pas eu lieu ! Bien sûr, nous devons émettre quelques réserves. Bien que nous ayons pris soin de multiplier les rencontres à différents moments clés de la journée sur un total de sept aires de l’A7, cela ne signifie pas que les problèmes n’existent pas.

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Nous savons qu’il y a déjà eu de l’attente aux deux aires de Montélimar à d’autres moments de l’année, et il serait intéressant de mener une enquête sur les Superchargers Tesla pour confirmer les dires de certains propriétaires. De plus, si une borne est indisponible sur les plus petites stations, cela peut rapidement causer des problèmes. En tout cas, pour cette première expérience, nous n’avons rencontré aucune file d’attente ni aucune voiture en panne sèche. Cela suffit à dissiper les préjugés !

Cependant, tout n’est pas parfait dans le monde de la recharge des voitures électriques lors des grands déplacements estivaux. Ce n’est pas tant l’autonomie (favorisée par les embouteillages) ou la densité et la fiabilité du réseau qui posent problème, mais plutôt l’utilisation qui en est faite. Si les taux de charge à l’arrivée sont élevés (les embouteillages faussent également les estimations), plusieurs conducteurs dépassent la barre des 80%. C’est sans doute la principale cause de congestion sur les petites stations ou en cas d’affluence plus importante. La suppression de la tarification à la minute chez la plupart des opérateurs encourage très probablement les conducteurs à charger plus que nécessaire. Cela ne coûte donc pas plus cher à ceux qui veulent profiter de leur pause, au détriment de ceux qui en ont vraiment besoin. Nous n’avons pas rencontré cette situation critique ce jour-là, mais elle peut se produire.

Conseils pour voyager sur l’autoroute A7 en voiture électrique

Selon le calendrier de Bison Futé, le samedi 5 août prochain est classé noir dans le sens des départs et orange dans le sens des retours. La circulation sera donc aussi, voire plus difficile que lors de notre reportage le week-end dernier. Pour éviter les tracas, anticipez autant que possible pour éviter les embouteillages et privilégiez les départs au milieu de la nuit si vous le pouvez. La température sera plus douce et les embouteillages inexistants. Cela vaut surtout en direction du sud : il est nettement plus agréable d’arriver en avance et de profiter des pieds dans l’eau plutôt que d’attendre dans les ralentissements.

Se tenir près de la borne et déplacer sa voiture une fois qu’elle est correctement chargée n’est pas des plus confortables lorsqu’on s’arrête pour se restaurer. Pourtant, c’est le comportement à adopter pour permettre aux autres de se recharger sans avoir à faire la queue. Si vous l’appréciez, pensez à le faire pour les autres. En journée, anticipez donc les conditions de circulation et rechargez uniquement le nécessaire. Ne suivez pas aveuglément les planificateurs d’itinéraires embarqués (si votre véhicule en est équipé). Si vous voyagez de nuit et que vous avez besoin de fermer l’œil, préférez dormir en dehors des emplacements réservés à la recharge des voitures électriques.

Enfin, vérifiez à l’avance l’affluence aux stations grâce à des applications dédiées comme Chargemap. Si possible, privilégiez les aires qui proposent un maximum de bornes rapides pour éviter les problèmes. Par exemple, nous vous conseillons de faire une pause à l’aire de Mornas plutôt qu’à celle de Montélimar : seulement 38 km séparent ces deux installations. Avec une Peugeot e-208, qui a l’une des autonomies les plus faibles sur l’autoroute, cela correspond à une perte de 20% de batterie avec une vitesse constante de 130 km/h. Si vous êtes juste en termes d’autonomie et qu’il n’y a pas d’embouteillages, réduisez votre vitesse. Dans le sens sud-nord, vous pouvez également parcourir d’une seule traite les 96 km qui séparent l’aire de Mornas-Les Adrets (station Ionity) de l’aire de Latitude 45 (station Electra). Vous y gagnerez en confort et en temps de recharge. À moins, bien sûr, que vous ne soyez un fan inconditionnel des nougats de Montélimar.

Comme d’habitude, notre analyse à un moment donné et en un seul endroit ne peut pas être généralisée. D’autres témoignages font état de problèmes dans les stations un peu partout en France. N’hésitez pas à partager vos expériences de voyage estival dans les commentaires, cela pourrait également aider les conducteurs dans d’autres régions du pays !