La Cour des comptes de l’Union européenne a exprimé des inquiétudes quant à la production de batteries électriques en Europe. Selon l’institution, le nombre de batteries électriques produites sur le Vieux continent risque de ne pas suffire à répondre à la demande croissante.
L’Europe s’efforce depuis quelques années de rattraper son retard dans la production de batteries électriques. Son ambition est d’être compétitive face aux nombreuses usines de batteries en Asie (CATL en Chine, LG en Corée du Sud, Panasonic au Japon). Actuellement, la Chine représente 76% de la production mondiale de batteries électriques, tandis que l’Union européenne ne représente que 7%.
Quelle est la position de l’Europe sur le marché mondial des batteries ?
Le constructeur automobile Volkswagen prévoit de construire six usines en Europe. L’Allemagne domine le marché européen de la production de batteries pour les véhicules électriques, avec 498 GWh de projets en cours. Juste derrière se trouvent la Hongrie, la Norvège, et enfin la France en quatrième position avec seulement 122 GWh, malgré les quatre grands projets récemment promis dans la vallée de la batterie dans les Hauts-de-France.
De plus, dans un avenir proche, Tesla pourrait devenir un acteur majeur dans le domaine des batteries électriques en Europe. Le constructeur américain prévoit de construire une usine de batteries près de sa Gigafactory à Berlin. Celle-ci aura une capacité annuelle de 100 GWh, avec une possible extension à 250 GWh. Un véritable atout pour l’Europe.
Au total, pas moins de 50 usines de batteries lithium-ion doivent être construites en Europe d’ici 2030. Bien que cela puisse sembler suffisant sur le papier, la Cour des comptes de l’Union européenne et les chercheurs ne sont pas du même avis. Selon Tobias Gehrke, chercheur en géo-économie au sein de l’European Council on Foreign Relations (ECFR), “l’Europe a les moyens de rivaliser. Nous sommes pour le moment dans une position acceptable, mais la pression augmente.”
L’Union européenne risque d’être distancée
Selon les travaux de la Cour des comptes, 68% des projets de construction en cours risquent d’être revus à la baisse, retardés ou interrompus en raison de la concurrence américaine et chinoise. L’Union européenne souhaite éliminer les moteurs thermiques d’ici 2035, mais a-t-elle les moyens de ses ambitions ? C’est essentiellement cela que la Cour des comptes met en avant.
Dans un rapport publié le lundi 19 juin 2023, l’institution estime qu’un “nouvel élan stratégique est nécessaire”. Malgré les initiatives stratégiques prises dès 2008, la chaîne de valeur des batteries en Europe dépend encore fortement des approvisionnements en provenance de pays tiers. La Cour des comptes anticipe même une pénurie de matières premières pour les batteries.
Selon Annemie Turtelboom, responsable de l’audit pour la Cour des comptes de l’Union européenne, “les chances que l’Union devienne un leader mondial dans la production de batteries ne semblent pas bonnes”. Selon l’institution, l’Union européenne risquerait même de ne pas atteindre son objectif de vendre uniquement des voitures neuves à zéro émission d’ici 2035. L’Union européenne doit absolument éviter de se retrouver dans la même dépendance avec les batteries qu’elle a connue avec le gaz russe.
Le principal problème réside dans la disponibilité des matières premières nécessaires à la fabrication des batteries. Pour le cobalt, le nickel, le lithium, le manganèse et le graphite naturel, cinq matières premières clés pour les batteries, l’Europe ne peut pas être autonome. Le continent dépend à 78% des importations provenant d’un petit nombre de pays.
Certains de ces pays sont confrontés à des risques géopolitiques importants, comme la République démocratique du Congo ou la Chine. Ces facteurs peuvent mettre en péril l’approvisionnement en matières premières. Selon le rapport de la Cour des comptes de l’Union européenne, il est même possible que la production européenne de batteries soit confrontée à une pénurie mondiale de matières premières essentielles dès 2030.
L’Europe aura du mal à rivaliser avec la Chine et les États-Unis sur le marché des batteries, malgré tous les efforts déployés pour y parvenir. La sécurisation de l’accès aux matières premières semble être le point de tension. Nous accusons un retard dans l’exploitation des minerais disponibles dans les sous-sols européens. Le Portugal en est un exemple frappant. Le pays possède les plus grandes réserves connues de lithium de l’Union européenne, mais celles-ci ne seront pas exploitées avant 2026 en raison des procédures d’autorisation nécessaires. Le retard accumulé au cours de ces années pourrait être fatal à l’Europe dans la course à la production de batteries électriques.