Le concept de Salut est fréquemment évoqué dans les Écritures. Il est question d’une puissance de Salut dans la maison de David, dans le cantique de Zacharie présent dans l’Évangile de Luc. Mais que signifie réellement ce terme dans le langage chrétien ? Est-ce équivalent à la rédemption ?
Selon saint Thomas d’Aquin, le Salut est atteint lorsque l’être parvient à accomplir sa raison d’être, et il est perdu lorsque cette réalisation n’est pas atteinte. L’Écriture affirme que nous sommes faits pour Dieu. Comme le dit saint Augustin dans les Confessions : “Tu nous as faits pour toi, Seigneur, et notre cœur est sans repos tant qu’il ne demeure en toi”. Ainsi, être sauvé revient à accomplir notre destinée, c’est-à-dire partager la vie divine. Cette perspective est loin d’être angoissante, elle est au contraire enthousiasmante, car notre nature profonde est de partager la vie de Dieu.
La place du Christ dans notre accession au Salut
Le projet de Dieu est de nous faire participer à sa vie. Malheureusement, le péché a entravé ce dessein divin. Bien que nous soyons faits pour voir Dieu, il arrive que nous ne suivions pas le chemin qui y mène. Il est nécessaire qu’un médiateur se mette en travers entre Dieu et nous, et Jésus est ce chemin qui nous conduit à Dieu, qui nous permet d’accomplir notre destinée. Le Salut a souvent été abordé en termes moraux, en définissant des catégories de péché. Il est temps maintenant de le redécouvrir en utilisant des termes théologiques et en se concentrant sur la destinée. Nous sommes faits pour Dieu, nous devons emprunter la route qui nous mène à Lui, et cette route est Jésus, le bon pasteur qui guide ses brebis vers la bergerie paternelle.
Salut, réalisation de soi et accomplissement divin
La réalisation de soi, dont on entend beaucoup parler, complète cette perspective. Pour l’homme, parvenir à la vie divine signifie accomplir son être, son essence, réaliser sa nature profonde. Cet accomplissement requiert l’aide du Seigneur, la grâce qui conduit à la gloire divine. Être sauvé, pour l’homme, c’est s’accomplir de manière parfaite, devenir pleinement humain, réaliser le dessein de Dieu pour l’homme.
Suivre le Christ pour parvenir à l’humanité accomplie
Pour devenir pleinement humain, il faut suivre le Christ pas à pas. C’est en lui que se révèle le mystère de l’homme, selon le concile Vatican II. Le grand schéma qui explique tout est celui de l’exode du peuple d’Israël, une parabole de toute vie humaine. Nous sommes tous initialement captifs de notre péché, de notre petitesse, et nous devons nous en libérer, parcourir le désert pendant quarante ans, où la joie et la liberté se trouvent, le lieu où Dieu parle. Enfin, nous devons traverser le Jourdain de notre mort pour accéder à la terre promise. Les baptisés ont traversé la mer Rouge lors de leur baptême, ils ont été libérés de l’esclavage de Satan, et ils sont maintenant dans le désert, ce temps merveilleux où Dieu les nourrit de la manne, de l’eucharistie, où il les abreuve de l’Esprit Saint, de l’eau jaillie du rocher. Dieu les accompagne jour après jour. C’est également une période de résistance, de chaleur et de soif, où l’on se plaint contre Moïse et Dieu. Pourtant, la marche continue et il faudra bien franchir un jour ce Jourdain de la mort pour entrer dans la vie plénière avec Dieu, dans la terre promise.
Sortir pour être sauvé
Le Salut est souvent décrit dans la Bible par le terme de “sortie”. On est sauvé lorsque l’on sort. Il est nécessaire de sortir pour être sauvé, que ce soit sortir d’Égypte pour le peuple hébreu, sortir du néant pour la création, qui est le premier acte de Salut. Dieu fait sortir dans la Bible. L’Ancien Testament appelle Dieu “Celui qui nous a fait sortir du pays d’Égypte”. C’est lui qui nous fait sortir de notre péché, qui a fait sortir Jésus du tombeau, qui a fait sortir Jonas de la baleine, qui a fait sortir Lot de Sodome… Le Salut est le fait d’être arraché à une situation périlleuse et de passer à une situation enviable. Le Salut implique trois étapes : être arraché à quelque chose de mauvais, traverser le désert et accéder à la terre promise.
Une terre promise invisible
La mort de Moïse est entourée de mystère. Le chapitre 34 du Deutéronome indique que “Moïse mourut sur la bouche du Seigneur, et il l’enterra, et nul ne sait jusqu’à ce jour où est son tombeau”. Il y a donc un halo de mystère entourant la mort de Moïse ! Peut-être que Dieu a conduit Moïse directement vers la véritable terre promise, dont la terre promise de ce monde n’est qu’un symbole.
La vie et la mort de Jésus-Christ pour notre Salut
Il existe de nombreuses théories sur la rédemption. La venue du Christ scelle définitivement l’alliance entre Dieu et les hommes. Dieu a conclu de multiples alliances avec l’humanité : il s’est allié à Adam, à Noé, à Moïse, à Abraham… et toutes ces alliances ont été rompues en raison du péché de l’homme et de l’infidélité des hommes. Dieu a donc trouvé le stratagème merveilleux de faire en sorte que la même personne, Jésus de Nazareth, soit pleinement Dieu et pleinement homme. Jésus, en sa personne, réunit de manière définitive la divinité et l’humanité, qui sont désormais indissociables pour toujours. La nature humaine est sauvée car elle est désormais liée de manière indéfectible à la divinité. L’Incarnation est déjà un geste de Salut. Quant à la signification de la mort de Jésus sur la croix et de sa résurrection, elle est liée à l’aventure du passage, qui est d’ailleurs le même terme utilisé pour décrire la Pâque des Hébreux, de l’Égypte à la terre promise, et la Pâque de Jésus-Christ, de la mort à la vie.
